Crimes et Châtiments, n° 1

Publié le par Yan

crimesetchatiments.jpgJe ne sais pas pour vous, mais moi, lorsque je reçois une revue, son titre fut-il une référence à Dostoïevski, dont la devise est « Quand le fait divers devient un fait majeur », un affreux doute m’étreint. La crainte est bien là de se voir confronté à une version de luxe du Nouveau Détective avec des articles de fond du genre « Il égorge son chihuahua avec les dents avant de la violer devant son mari tétraplégique et de sortir danser la gigue dans la rue en invoquant Satan ».
Bref, j’étais quelque peu dans l’expectative lorsque les éditions Jacob-Duvernet m’ont fait parvenir ce premier numéro de Crimes et Châtiments.

Nouvelle revue à s’engouffrer dans la brèche ouverte par XXI en faisant entrer le magbook en librairie, Crimes et Châtiments, on l’aura compris se consacre exclusivement aux faits divers. Un terrain glissant qui prête particulièrement à la dérive voyeuriste.
L’heureuse surprise est finalement là. En ce que, justement, la revue évite plutôt bien cet écueil, au travers notamment d’un plutôt bel article de Dominique Verdeilhan sur la difficulté que peut avoir le chroniqueur judiciaire à garder pour lui l’indicible auquel il est souvent confronté. Les faits divers qui ont plus ou moins défrayé la chronique, comme l’affaire Krombach ou le meurtre de touristes allemands aux Marquises côtoient un dossier consacré aux femmes (tueuses, de criminels, policières…), une petite histoire du maquis corse ou encore un fait divers de 1911 mettant en scène un fin limier du 36, Quai des Orfèvres chargé d’enquêter sur ses propres cambriolages. Le tout est ponctué de petites rubriques (brèves, chroniques de livres, retour sur des lieux mythiques…) qui allègent l’ensemble.

Belle revue, donc, inégale parfois (on se demande encore comment Hafed Benotman se retrouve, dans cet article consacré à après la prison, exclusivement entouré de délinquants sexuels) mais plutôt agréable dans l’ensemble et même intelligente, Crimes et Châtiments s’avère valoir le détour. Et elle nous rappelle que, contrairement à ce que veulent nous faire croire Le Nouveau Détective, une frange de la littérature consacrée au thriller gore, ou quelques journalistes un peu trop enclins à vouloir impressionner le public, la réalité ne dépasse tout de même que rarement la fiction. Et que ce qui fait l’essence d’une histoire, vraie ou fausse, ce n’est pas les litres d’hémoglobines qu’on trouvera en cours de route ou à l’arrivée, mais bien les hommes et les femmes qui en sont les acteurs.

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