Jungle rouge, de Kent Harrington

Publié le par Yan

junglerouge.jpgRussel Cruz-Price, journaliste issu d’une grande famille guatémaltèque, a été élevé aux États-Unis, ou vivait son père et où il été scolarisé. Il n’est pas retourné au Guatemala depuis que sa mère y est morte durant la guerre. S’il y revient par le biais de son travail, c’est aussi dans l’idée de racheter une plantation de café sur laquelle, d’après un archéologue allemand, pourraient se trouver des vestiges mayas et en particulier un fabuleux jaguar en jade. Mais, poussé par ce qui ressemble à s’y méprendre à un désir de mort, Russel va multiplier les liaisons dangereuses dans ce pays en pleine crise économique, gangrené par la violence et au bord du chaos : avec Malher l’archéologue mais aussi avec Antonio Madrid, candidat à l’élection présidentielle, et son adversaire le général Selva, dirigeant des services secrets et tortionnaire patenté. Plus encore, il va devenir l’amant de Béatrice, la femme de Selva.

À l’image de la jungle guatémaltèque, l’intrigue de ce roman est touffue. Et elle a, de prime abord, de quoi séduire le lecteur à la recherche d’exotisme et d’aventure.

De fait, c’est bien là ce que nous fait miroiter Kent Harrington : la recherche d’une cité perdue, des manœuvres de basse politique derrière lesquelles l’ombre de l’ogre américain, fondateur de cette première république bananière, s’agite, un zeste d’histoire d’amour ambigüe, un brin de secrets familiaux enfouis… tous les ingrédients sont réunis pour une grande saga.

Mais Jungle rouge n’est pas une saga. C’est un roman. Et même si, avec plus de 400 pages, il est assez conséquent, il ne suffit pas à restituer l’ampleur de ce que l’on aurait pu attendre d'après ce qu’il semblait nous promettre. Kent Harrington centre son intrigue sur la personnalité de Russel et sur celle de sa mère et, finalement, le reste apparaît vite comme accessoire. Personnages comme intrigues secondaires se parasitent les uns les autres et le lecteur qui pouvait s’attendre à autre chose, que ce soit un roman noir politique ou un roman d’aventures, finit par rester quelque peu sur sa faim.

Tout n’est pas négatif bien entendu. L’écriture de Kent Harrington est plutôt agréable, les passages sur la situation du Guatemala sont parfois passionnants et éveillent la curiosité, la partie dans la jungle à la recherche du jaguar fait entrevoir un possible très bon roman d’aventures… mais cela laisse finalement un goût d’inachevé tant Harrington a tout axé sur son personnage principal pour lequel on peine à éprouver une quelconque empathie ou, au contraire, une réelle antipathie. 

En fin de compte, Jungle rouge est une lecture assez plaisante, car l’auteur réussit malgré tout à accrocher le lecteur, mais sans doute aussi assez vite oubliée. Peut-être ce que l’on peut qualifier de bon roman de plage. On a en tout cas envie de lire un autre roman de cet auteur pour voir s’il peut se montrer à la hauteur des promesses qu’il nous a ici juste laissées entrevoir.

Kent Harrington, Jungle rouge (Red Jungle, 2004), Éditions du Rocher, 2009. Rééd. Folio Policier, 2012. Traduit par Nordine Haddad.

Publié dans Noir américain

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